Détective privé pour collecter des données personnelles à l’insu des salariés : pratique validée ? | Fieldfisher
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Détective privé pour collecter des données personnelles à l’insu des salariés : pratique validée ?

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France

L'article 4 du Titre 1er de la loi Informatique et Libertés (6 janv. 1978, n°78-17) stipule que les données à caractère personnel doivent être traitées de manière loyale. Cependant, la notion de loyauté dans le traitement des données personnelles est rarement évoquée dans les décisions judiciaires françaises. À cet égard, l'arrêt du 30 avril 2024 (Cass. Crim., n°23-80.962) apporte un éclaircissement précieux sur ce concept parfois jugé flou.

Dans cette affaire, le Directeur de la sécurité de la société Ikea avait engagé un enquêteur privé pour collecter des données personnelles sur les salariés de l'entreprise. Parmi ces données figuraient "les antécédents judiciaires, renseignements bancaires et téléphoniques, véhicules, propriétés, qualité de locataire ou de propriétaire, situation matrimoniale, santé et déplacements à l'étranger". Les moyens employés comprenaient "la capture et du recoupement d’informations diffusées sur des sites publics tels que sites web, annuaires, forums de discussion, réseaux sociaux, sites de presse régionale".

La question posée était de savoir si la collecte de données librement accessibles sur Internet pouvait violer le principe de loyauté. La chambre criminelle a répondu par l'affirmative. La Cour de cassation a estimé que "le fait que les données à caractère personnel collectées par le prévenu aient été pour partie en accès libre sur internet ne retire rien au caractère déloyal de cette collecte, dès lors qu’une telle collecte, de surcroît réalisée à des fins dévoyées de profilage des personnes concernées et d’investigation dans leur vie privée, à l’insu de celles-ci, ne pouvait s’effectuer sans qu’elles en soient informées".

Les Hauts magistrats ont donc affirmé que la loyauté du traitement des données était indissociable de l'information des personnes concernées. En effet, comme l'avait jugé la Cour d'appel de Versailles dans l'arrêt objet du pourvoi, le manque de transparence prive le salarié de son droit d'opposition prévu par la loi Informatique et Libertés.

Ainsi, peu importe que les données personnelles soient librement disponibles sur Internet, dès lors que la condition d'information n'est pas remplie.

 

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