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Droit du travail en pleine transformation, outils et stratégies innovantes

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Le droit du travail est actuellement bouleversé par de profondes mutations. Laurence Dumure Lambert et Julia Mohamed, associées au sein du département droit social de Fieldfisher France, expliquent comment leur pratique se transforme pour anticiper ces évolutions et accompagner le développement de leurs clients.

Informations Entreprise : Pouvez-vous nous donner un aperçu des principales mutations récentes du droit du travail ?

Julia Mohamed (Associée, Département droit social) : Nous notons qu’au cours de ces dernières années, le droit du travail se complexifie fortement – du fait notamment d’une actualité jurisprudentielle et législative de plus en plus importante – ce qui requiert des adaptations permanentes de notre part et de l’information et des formations à destination de nos clients.

En outre, nous constatons une forte européanisation de la réglementation. En effet, un nombre croissant de nouvelles lois découlent de la législation européenne. Nous pouvons citer par exemple la directive sur les lanceurs d’alerte, la directive sur les travailleurs de plateformes, la directive sur la transparence des rémunérations, les problématiques des congés payés pendant la maladie etc... qui sont transposées dans les systèmes juridiques nationaux des différents pays européens.

Laurence Dumure Lambert (Associée, Département droit social) : J’ajouterais deux autres évolutions majeures récentes : d’une part, l’influence de la négociation interprofessionnelle au niveau national et d’autre part la révolution que constitue l’intelligence artificielle. En matière de droit du travail, de nombreuses lois françaises sont rédigées sur la base des accords interprofessionnels négociés au niveau national.

En matière de droit du travail, de nombreuses lois françaises sont rédigées sur la base des accords interprofessionnels négociés au niveau national. Ainsi les dispositions relatives au télétravail sont issues de l’Accord National Interprofessionnel (ANI). La loi de novembre 2023 sur le partage de la valeur est également une transposition d’un accord interprofessionnel conclu en février 2023.

Enfin, l’utilisation accrue de l’intelligence artificielle au sein des entreprises représente bien sûr une mutation considérable. Les employés qui recourent à des outils comme ChatGPT pour leurs recherches soulèvent des questions relatives au droit d’auteur et à la vérification des sources, nécessitant une adaptation des politiques internes sur l’utilisation de l’intelligence artificielle et la protection de la propriété intellectuelle de l’entreprise. Cette situation appelle une régulation similaire à celle déjà appliquée pour les médias sociaux ou internet, visant à encadrer l’usage de ces technologies novatrices pour prévenir les risques qui pourraient en découler pour les entreprises.

I.E : Quels sont les impacts de ces mutations sur les besoins des entreprises ? Comment aidez-vous vos clients à y faire face ?

Julia Mohamed : Le droit social est de plus en plus technique. L’avalanche de textes nécessite de consacrer de plus en plus de temps aux problématiques de droit social, d’autant que les directives européennes énoncent des principes qui doivent se décliner dans l’ensemble des droits nationaux. Il faut souvent trouver les correspondances en droit national, ce qui nécessite des interprétations. Les entreprises ont besoin d’experts qui se consacrent à plein temps au suivi des changements législatifs et se plongent dans la complexité des textes.

Notre rôle consiste à être proactifs et à alerter nos clients sur l’impact de ces évolutions au sein de leur organisation. Ainsi, par exemple, nous sommes capables de décrypter pour eux les évolutions européennes  : quels sont les principes et les notions en droit national auxquels le législateur européen fait référence  ? Quelles seront les transpositions en droit national  ? Lorsque nos clients gèrent plusieurs juridictions, nous les aidons à trouver les règles communes leur permettant d’harmoniser leur politique groupe et ainsi de simplifier la mise en œuvre. A cet égard, le réseau Fieldfisher, composé de plus de 50 avocats en droit social au sein de 12 pays est un réel atout pour comprendre les spécificités de chaque pays et identifier les points communs grâce auxquels il est possible d’optimiser les solutions. Nous proposons également des formations et des webinars avec nos collègues européens qui permettent de présenter de façon synthétique les similarités et les spécificités de chaque pays. Par exemple, nous avons organisé avec notre réseau une série de webinars sur la thématique des dispositifs de signalement d’alerte (whistleblowing) et une autre sur la transparence des rémunérations.

Laurence Dumure Lambert  : Nous proposons également un accompagnement pointu, en collaboration avec notre équipe Tech & Data, sur les nouvelles problématiques posées par l’utilisation de l’intelligence artificielle  : chartes informatiques, droit d’auteur, confidentialité, données personnelles, conformité au RGPD. La pluridisciplinarité de notre cabinet offre un avantage décisif car les nouveaux enjeux des entreprises nécessitent de mobiliser des expertises multiples.

I.E : Comment Fieldfisher France s’organise-t-il pour répondre aux nouveaux besoins de ses clients ?

Julia Mohamed : Pour répondre efficacement à ces nouveaux défis complexes, nous adoptons une approche holistique prenant en compte l’ensemble des enjeux de l’entreprise. Grâce à notre offre multidisciplinaire – nous disposons d’une vingtaine d’expertises au sein de Fieldfisher France – nous pouvons proposer à nos clients des solutions complètes et intégrées. Ainsi, sur les questions relatives à l’usage de l’intelligence artificielle, nous collaborons avec les équipes Tech & Data et Propriété intellectuelle. Autre exemple  : nous disposons d’une expertise pointue sur un sujet encore peu traité : le volet environnemental des consultations du CSE sur lequel nous sommes en lien avec notre département droit de l’environnement.

Laurence Dumure Lambert  : Notre collaboration étroite avec les homologues européens de notre réseau nous permet également de déployer des outils et des solutions homogènes sur l’ensemble des juridictions dans lesquelles nos clients sont présents.

I.E : Pourriez-vous partager un exemple concret où votre expertise a permis à une entreprise de s’adapter de manière proactive à ces changements ?

Laurence Dumure Lambert : Au moment de la transposition de la directive sur les lanceurs d’alerte, nous avons aidé plusieurs groupes internationaux à se mettre en conformité dans différents pays. Dès la parution des textes nationaux, nous avons décrypté les similitudes et les différences selon les législations nationales afin de permettre aux clients de construire une politique la plus uniforme possible. Outre la rédaction de la politique d’alerte, nous avons été capables de proposer à nos clients les services informatiques d’une plateforme d’alerte que nous avions identifiée en amont. Cet accompagnement a permis à nos clients d’appréhender différentes législations rapidement en évitant les sanctions prévues par certains droits nationaux du fait de l’absence de mise en place d’un canal d’alerte professionnelle, notamment en droit belge.

I.E  : Comment percevez-vous le nouveau rôle de l’avocat en droit social dans les années à venir ?

Laurence Dumure Lambert  : L’avènement de technologies, notamment l’intelligence artificielle, s’annonce comme un tournant majeur pour notre profession. Non seulement elle promet de révolutionner nos interactions avec les clients, à travers des plateformes sécurisées permettant un échange fluide de données, mais également d’optimiser notre efficacité interne. 

Imaginez un monde où l’intelligence artificielle prendrait en charge les calculs d’indemnités de licenciement, le coût pour l’entreprise d’une rupture conventionnelle, le montant net des indemnités pour les salariés, éliminant ainsi le recours à des tableaux Excel fastidieux. Ce progrès nous libérerait de tâches répétitives et nous permettrait de nous concentrer sur des missions à plus forte valeur ajoutée, telles que la stratégie, la négociation, le contentieux, où le facteur humain et l’expertise juridique prennent tout leur sens. Grâce aux legal tech qui se perfectionnent sans cesse, notre rôle d’avocat évolue déjà : recours à des logiciels de traduction, introduction d’outils de justice prédictive, aide à la rédaction des conclusions et contrats. Nous libérons ainsi du temps pour mieux nous consacrer aux attentes de nos clients et produire plus rapidement.

L’innovation est au cœur de notre métier, et cette tendance ne fera que s’accélérer, nous amenant à fournir des solutions sur mesure et innovantes pour répondre aux défis complexes de nos clients, en particulier dans le cadre d’opérations de fusions et acquisitions internationales. La technologie renforce notre capacité à innover et à créer de la valeur, redéfinissant ainsi notre valeur ajoutée en tant qu’avocats.

Paru dans Informations Entreprise N°191 Juillet, Août, Septembre 2024.

 

 

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